Bientôt, nous serons libres.
Nominée aux Golden Globes en tant que Meilleure Réalisatrice, Ava Marie DuVernay nous offre ici un film historique, pédagogique, sur l’un des mouvements civiques les plus fondamentaux de notre Histoire.
Etats-Unis d’Amérique. Il y a tout juste cinquante ans, en 1965.
Deux ans après l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy qui avait milité contre la ségrégation raciale aux Etats-Unis. Deux ans après le discours de Martin Luther King: “I have a dream”.
La population Afro-Américaine est légalement autorisée à voter depuis 1870, d’après le VIème amendement de la constitution.
Mais dans le Sud, il n’en va pas si simplement pour les citoyens noirs: les lois “Jim Crow”, parfaitement arbitraires, rendent leur accès au vote pratiquement impossible en leur imposant des interrogatoires faussés, ainsi qu’une taxe que nombre d’entre eux n’ont pas les moyens de payer.
C’est alors que Martin Luther King choisit de mener une lutte déterminée et pacifique contre le bafouement des droits des citoyens américains de peau noire, contre la passivité de Lindon B. Johnson (Tom Wilkinson) et le racisme assumé de Georges Wallace, le gouverneur de l’Alabama (Tim Roth).
Le 7 mars 1965, 600 manifestants pour le droit de vote des Afros-Américains se mettent en marche depuis Selma. Dans cette ville d’Alabama, seul 1% de la population noire (qui représente pourtant plus de la moitié des habitants locaux) est inscrite sur les listes de votes. Leur but est d’atteindre Montgomery, capitale de l’Etat.
Mais de l’autre côté du pont qui mène à la ville, ce sont des centaines de policiers qui attendent ces hommes et femmes venus lutter pour leurs droits civiques, avant de fondre sur eux, armés de matraques et de gaz lacrimogène. Le nombre de blessés donnera à cette journée historique le nom de “Bloody Sunday”.
C’est sur ces évènements fondamentaux qui ont marqué l’Histoire universelle que revient la réalisatrice Afro-Américaine Ava Marie DuVernay, qui avait notamment réalisé “Middle of Nowhere” en 2012 pour lequel elle avait remporté le prix de la Meilleure Réalisatrice au Festival de Sundance, devenant la première réalisatrice de couleur à remporter ce prix.
Elle donne le rôle de Martin Luther King à David Oyelowo (“Interstellar”, “The Last King of Scotland”) qui parvient à retranscrire la dignité et la ferme résolution du grand homme. Si sa diction particulière est parfois un rien guindée, nous adhérons à la fougue des discours qui écrivirent l’Histoire.
C’est là ce qu’est avant tout Selma: un cours d’Histoire qui nous permet de nous replonger dans ces événements terribles et fondamentaux, qu’il ne faut avoir de cesse de raconter aux générations futures, pour ne jamais oublier ce qui constitue les piliers de notre société, ce qui est encore bien trop souvent bafoué et foulé aux pieds.
Selma est un film sur la dignité humaine, sur le droit de l’homme à être libre, et à vivre dans l’égalité, et le respect de l’autre.
De facture classique, c’est par ce qu’il retranscrit de l’Homme et de son Histoire, bien davantage que par sa réalisation elle-même, qu’il nous touche, nous choque, nous révolte et nous marque.
La palette chromatique de la photographie alterne entre des tons caramels, ocres, chocolat, lorsque Martin Luther King et les siens se rassemblent et mettent sur pied leur stratégie pacifique et digne, la lutte déterminée pour laquelle ils sont prêts à laisser leur vie. Le constraste est cinglant d’avec la lumière aveuglante et blanche de la rue, lorsque tous se rassemblent pour marcher avec calme et courage face à ceux qui les considèrent comme des non-hommes, face à ceux qui veulent leur interdire de vivre.
Un film à montrer à nos enfants et aux prochaines générations pour ne jamais oublier mais continuer de dénoncer.