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"Wild" de Jean-Marc Vallée

Hollywoodienne randonnée

Après avoir été couronnée en 2006 par l’Oscar de la Meilleure Actrice pour “Walk the Line”, Reese Witherspoon revient sous les projecteurs d’Hollywood avec le personnage de Cheril Strayed qu’elle interprète dans le film “Wild” dont elle est aussi la productrice.

Le halètement d’une femme qui marche se fait entendre en off, tandis que nous contemplons la beauté de massifs rocailleux baignés de soleil. Une chaussure entre dans le cadre, pour venir occuper le premier plan: c’est celle de Cheryl Strayed (Reese Witherspoon), vêtue d’un mini-short dont s’échappent deux longues jambes galbées et couvertes de bleues.

Cheryl crie de douleur en ôtant son autre soulier, et découvre l’étendue du désastre: son ongle d’orteil ensanglanté ne tient plus qu’à la racine, et c’est en se répétant un mantra, entre deux respirations saccadées – “I’m gonna be a hammer, not a nail” -, qu’elle l’arrache d’un grand coup sec.

La douleur fait basculer la jolie blonde contre son sac à dos, gigantesque et plus lourd qu’elle-même, et sa première chaussure, alors déséquilibrée, tombe dans le ravin.

Cheryl, à bout de forces et ne pouvant y croire, la regarde rebondir sur les rochers, avant de hurler un retentissant “Fuck youuuu, biiiiitch!” qui vient troubler le silence de la paisible et magistrale nature alentour.

Le décor est campé: nous sommes avec cette jeune femme émotive, impulsive mais déterminée, dans les hauteurs du Chemin des crêtes du Pacifique, ce trek de plus de 4000 kilomètres qui s’étend de la frontière mexicaine à la frontière canadienne.

 

Cheryl Strayed a véritablement existé, et c’est de son ouvrage autobiographique “Wild: From Lost to Found on the Pacific Crest Rail”, que le film s’inspire.

Lorsque la jeune auteur l’envoie à Reese Witherspoon avant même qu’il ne paraisse, l’actrice en acquiert immédiatement les droits à travers sa société de production Pacific Standard, s’attribue le rôle principal, et en confie l’adaptation à Nick Hornby (“High Fidelity”) et la réalisation à Jean-Marie Vallée, le réalisateur québécois de “Dallas Buyers Club” et de “C.R.A.2.Y.”

Ces derniers choisissent de suivre la structure du récit d’origine et de parsemer le trek de flash-backs, de manière à progressivement permettre au spectateur de se faire une idée de qui est cette Cheryl, et de ce qui l’a conduite à relever le défi de parcourir à pied pendant trois mois la côte Ouest des Etats-Unis. Jean-Marie Vallée joue sur les associations d’idées, sur la juxtaposition d’images et de sons, allie monologues intérieurs brefs et souvenirs de conversations passées pour explorer la solitude, la mémoire, et la volonté qui est celle de Strayed de reprendre son destin en main.

On aimerait croire à un nouveau “Into the Wild”, mais force est de constater que Vallée s’appuie ici sur les ressorts habituels du mélodrame hollywoodien, que certaines faiblesses persistent et que l’histoire de Cheryl Strayed reste relativement convenue, sans que son traitement ne parvienne à dépasser cette banalité.

Toutefois, si le personnage de la mère de Cheryl (qui valut à Laura Dern une nomination aux Oscars pour la Meilleure Actrice dans un Second Rôle) commence par nous irriter avec son optimiste constant et à outrance,  les deux comédiennes parviennent finalement à créer une relation mère-fille crédible, un rapport fait d’amour et de honte, de comparaison et de filiation, de reproches et d’admiration, qui constitue sans doute ce que le film a de plus marquant et de plus réussi.

 

 

 

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Auteur·e

etageres