Un feu dans la cheminée, du cidre sur la table.
Je me l’étais imaginé autrement…
Je les vois, elles sont voilées, le soleil sur leurs beaux visages.
Mon cœur, petit, serré, si douloureux dans ma poitrine.
Je me réveille en sursaut : Où ? Je pars ?
Je pense à ma mère, à mes parents. Je pense à ma famille.
Non. Je ne pars pas.
Une petite fille rêve d’un poisson rouge. Elle le désire plus que tout autre chose. Sa mère tente de lui expliquer qu’elle en a déjà bien assez, dans le bassin du jardin.
Mais la petite fille ne peut pas oublier : ce poisson rouge, si beau, si joufflu, en si bonne santé, ce poisson rouge aux écailles dorées, c’est désormais toute sa vie, toute sa volonté, elle ne pourra pas s’en remettre, elle ne pourra pas surmonter – il est essentiel, vital, indispensable d’y retourner, de lier ce poisson rouge à sa vie, de ne pas le laisser passer.
Des mots en boucle, une mélodie lancinante. Tant et tant qu’elle me réveille. En sueur et en sursaut.
Où ? Je pars ?
Non… Je ne pars pas…
La chaleur d’un désert inconnu. La saveur d’une langue jamais prise en bouche.
Nous sommes dans l’avion. Nous nous regardons, et d’un commun élan, arrangeons nos voiles.
Instant figé, attendu, espéré, depuis si longtemps, si longtemps, depuis toujours…
Nous nous regardons à nouveau, à présent voilées, et frémissons d’impatience, de bonheur surexcité.
Non…
J’ai les cheveux à l’air libre, et le vent normand dans ma nuque.
Khonak an dam ke neshinim dar eyvan, man o to
Be do naghsho be do soorat, be yeki jan, man o to
Khosh o faregh ze khorafat-e-parishan, man o to
Man o to bi man o to jam’ shavim az sar-e-zogh
C’est le bon choix, la bonne décision. Je regarde mes parents, ma mère, et je suis sereine. Émue. Je ne tremble plus.
Mais toujours, en moi cet attrait, cet envoûtement… Fascination, profonde impulsion, brûlant désir jamais éteint de découvrir, un jour, une nuit, ce fou pays…
L’Iran…
Le pays où un jour j’arriverai.